BODYBUILDING
L’ÉMERGENCE DE   LA NABBA : MR UNIVERS

    Sous l’impulsion des frères canadiens Joe et Ben Weider, l’IFBB (International Federation of bodybuilders, rebaptisée en 2004 « Fédération internationale de culturisme et fitness ») fut fondée en 1946, et basée à Montréal, même si les États-Unis participèrent également à la fondation de cette nouvelle fédération sportive internationale. Déjà responsable des publications Your Physique (depuis 1943), puis Muscle Power (en 1945), les frères Weider vont alors organiser leur première compétition en 1947, le “Canada’s Most Perfect Physique and Most Muscular Man Contest”, puis en 1948 un Mr. New York State, et un Mr. Montréal (le lendemain du show newyorkais). En 1949 ils lancent leur premier Mr. America IFBB, faisant ainsi ouvertement concurrence au Mr. America de l’AAU, mais ce ne sera que pour une année seulement ! (Les éditions de Mr. America organisé par l’IFBB ne reprendront pas avant 1959). Mais c’est à partir de 1965, date du premier Mr. Olympia de l’histoire, que l’IFBB gagnera vraiment en influence, avant de devenir à partir du début des années 1970 la plus importante et prestigieuse fédération de culturisme au monde.

Les frères WEIDER à leurs débuts, dans leur bureau à Montréal

Comme nous l’avons vu l’IFBB ne fut pas vraiment une menace pour l’AAU durant les années 50, mais il n’allait pas en être de même avec une autre fédération concurrente, émergeant cette fois outre-Atlantique, j’ai nommé la NABBA.

En 1906 la Health & Strength League fut fondée sous l’impulsion d’un entrepreneur britannique, Hopton Hadley. Liée au magazine “Health & Strength“ (dont les éditions paraissent depuis la fin du XIXème siècle) cette League anglaise promouvant la culture physique décida en 1948 de promouvoir à Londres, en marge des Jeux Olympiques d’été, un concours nommé Mr. Univers (rien que ça !). En réalité le vrai premier concours du nom de Mr. Univers de l’histoire fut organisé l’année précédente, mais à Philadelphie, et par la IWF (International Weightlifting federation). Il fut remporté par l’américain Steve Stanko, en partie grâce au fait que les grandes stars de l’époque étaient absentes à cette édition, soit par choix personnel, ou bien alors par interdiction : cette compétition étant réservée aux amateurs elle ne pouvait alors accueillir des athlètes ayant le statut professionnel à l’AAU. C’est ainsi que John Grimek par exemple, pourtant présent, ne fut autorisé qu’à y faire un posedown de démonstration en tant que simple invité… Autant vous dire que la victoire de Stanko fut très controversée (combien même ce bodybuilder américain était d’un excellent niveau car il avait déjà remporté de prestigieux titres).

Cette édition de Mr. Univers (première du nom) fut la seule et unique édition organisée par l’IWF. Et si en 1949 il n’y eu aucune édition de Mr. Univers (toutes fédération confondues), en coulisse les choses allaient pourtant bon train. Poussée par le succès de son édition de 1948, remportée cette fois par le célèbre John Grimek, devant le non moins célèbre Steve Reeves, la Health & Strength League décida de créer une antenne dédiée uniquement au culturisme. C’est ainsi que fut créé, à la fin de l’année 1949, la NABBA (National Amateur Body-Builders' Association), promouvant alors l’année suivante (à Londres toujours) le premier Mr. Univers NABBA de l’histoire de ce sport. Cette édition de 1950 fut cette fois remportée par Steve Reeves, qui lors de ce Mr. Univers (qui allait être la dernière compétition de sa courte carrière de compétiteur, seulement 5 ans !) allait avoir pour dauphin l’une des futures plus grandes figures de l’histoire de ce sport, dont je tairais le nom pour le moment afin de vous garder en haleine…

Podium du Mr Univers 1948

Mais ce que je peux vous dire, c’est que ce relai d’une icône alors reconnue, à une icône en devenir, fut ainsi assuré de la plus belle des manières, car quoi de plus gratifiant et prestigieux que de se faire battre par le plus Grand, avant de prendre le relai et de devenir soi-même le plus Grand ! Si l’on devait chercher une similitude de ce calibre dans l’histoire du culturisme, c’est sans aucun doute le relai qui allait avoir lieu presque deux décennies plus tard qui me viendrait tout de suite à l’esprit, avec un certain Arnold Schwarzenegger terminant deuxième derrière la célébrité de l’époque, Sergio Oliva, avant que l’autrichien ne prenne les reines de ce sport pour la décennie à venir…

Pour en revenir à la NABBA, cette nouvelle association sportive, qui dans un premier temps avait pour but de promouvoir les évènements de culturisme en Angleterre, aller devenir, devant le professionnalisme et le succès de ces premières éditions de Mr. Univers, le rendez-vous annuel majeur des meilleurs culturistes de la Planète. À partir de 1952 cette compétition allait se subdiviser en deux divisions distinctes, attribuant désormais au meilleur des athlètes débutants le titre de Mr. Univers Amateur, et au meilleur des athlètes confirmés le titre de Mr. Univers Professionnel. Ainsi, lorsque je parlerai dorénavant du titre de Mr. Univers je parlerai principalement du titre décerné chez les Professionnels, car c’est bien évidemment celui-ci qui a le plus d’importance et de prestige.

Pendant 20 ans (du début des années 50 jusqu’à la fin des années 60) les 3 fédérations sportives précédemment citées s’engagèrent ainsi dans une bataille, chacune de ces fédérations revendiquant alors attribuer le titre de meilleur culturiste du monde à l’athlète remportant leur compétition annuelle respective. Comme je l’ai déjà mentionné, durant les années 50 cette bataille n’eut lieu qu’entre le Mr. America de l’AAU et le Mr. Univers NABBA (l’IFBB restant en retrait). Dans ce duel la NABBA prit légèrement le dessus, le titre de Mr. Univers devenant alors le plus convoité.
En 1959 le Mr. America de l’IFBB fit son retour, faisant alors une sérieuse concurrence au concours du même nom organisé par l’AAU. Mais durant la première moitié des années 60, toujours sous l’impulsion d’Oscar Heidenstam (ancien compétiteur, puis secrétaire général de la NABBA depuis 1956), le Mr. Univers NABBA resta bel et bien le plus prestigieux concours annuellement organisé, celui que les meilleurs athlètes du monde entier rêvaient de remporter.

Oscar Heidenstam
Oscar Heidenstam

La seconde période du Silver Age du culturisme (début années 50 à 1964) vit une quantité d’athlètes très hétéroclites et de plus en plus talentueux fouler la scène des plus grands rendez-vous internationaux, et si je devais choisir quelques-uns des vainqueurs parmi les plus marquants des concours Mr. America ou Mr. Univers NABBA, je citerai les athlètes suivants, tous ayant remporté au moins deux titres majeurs : Jack Delinger, Jim Park, Dick DuBois, Ray Schaefer, Tom Sansone, Paul Wynter, et Joe Abbenda.

Jack Delinger
Jim Park
Dick DuBois
Ray Schaefer
Tom Sansone
Paul Wynter
Joe Abbenda

Il me semblait également intéressant que je dise un mot sur trois autres athlètes qui ont également marqué cette époque : Melvin Wells, Leroy Colbert, et Vince Gironda.

Tout d’abords l’américain Melvin Wells : possédant un physique bien proportionné, volumineux (avec notamment des bras énormes), et une musculature significativement découpée, cet afro-américain avait tout pour devenir l’une des grandes figures du Silver Age… Mais dans une Amérique en pleine ségrégation raciale Wells fut relégué à la deuxième marche du podium des Mr. America AAU de 1949 et 1950, et pour lui (tout comme bon nombre d’historiens du culturisme) cette injustice fut le fruit d’un racisme encore trop présent à l’époque, les milieux sportifs n’y échappant malheureusement pas. Résigné, Melvin Wells désira dès lors tirer un trait sur ses ambitions de compétiteur.

Melvin Wells
Melvin Wells

Abordons ensuite le cas de l’américain Leroy Colbert, qui apporta de l’innovation sur les intensités d’entrainement, et qui présentait déjà l’âge de 20 ans une musculature très impressionnante. Dans sa jeunesse il décrocha les titres de Mr. New York City AAU de 1952, puis le Mr. Eastern America AAU de 1953, il était alors promis à un palmarès international des plus brillants… Mais c’était sans compter sur un accident de moto en 1955 qui le marqua profondément, et qui fort malheureusement mit fin prématurément à sa carrière de compétiteur. C’est fort regrettable car Colbert avait le potentiel pour devenir lui aussi une des légendes de ce sport !

Leroy Colbert
Leroy Colbert

Et pour terminer, le cas de Vince Gironda : bien qu’ayant terminé sur le podium de certaines éditions des plus prestigieuses compétitions de l’époque, ce bodybuilder américain n’a cependant jamais reporté de titre. Mais les nombreuses évolutions qu’il apporta sur les techniques d’entrainement et sur la nutrition fera de lui un athlète très populaire dans le monde du culturisme.

Vince Gironda

Je viens de vous présenter quelques-uns des plus talentueux culturistes de la seconde période du Silver Age, mais j’ai volontairement omis d’en énumérer deux, les plus célèbres et prestigieux, histoire de garder le meilleur pour la fin…

Le début des années 50 allait voir arriver une future légende de ce sport : battu par l’incroyable Steve Reeves lors Mr. Univers NABBA de 1950, nous assisterons en 1951 à l’avènement d’un certain Reg Park. Cet athlète d’origine britannique allait dès lors écraser la concurrence durant de nombreuse années. Park ne concourait que très peu, seulement 3 compétitions de 1951 à 1965 ! Mais à chaque fois qu’il montait sur une scène ces adversaires n’avaient absolument aucune chance ! Park fut sacré Mr. Univers NABBA en 1951, 1958, et 1965. Vers la fin de sa carrière, à pourtant 40 ans passé, il termina à trois reprises sur le podium du Mr. Univers NABBA, respectivement en 1970, 1971, et 1973.
Dotée d’une masse musculaire jusqu’alors inégalée dans l’histoire du culturisme, Reg Park fit franchir une nouvelle étape à l’évolution de ce sport. À travers les innombrables couvertures de magazine de culture physique lui rendant hommage, mais aussi de par sa présence au cinéma dans ses nombreux rôles d’Hercule (à l’instar de Steeve Reeves), Park fut un formidable promoteur pour la popularisation de ce sport. Idole de toute une génération de culturistes il devient l’exemple à suivre, inspirant les plus Grands qui lui succédèrent, et devenant notamment le mentor d’un certain Arnold Schwarzenegger…

Reg Park
Reg Park
Reg Park

Je terminerai ce long article sur le Silver Age par l’américain Bill Pearl (William Arnold Pearl de son vrai nom). Cet athlète avait clairement de quoi impressionner grâce à son volume et son équilibre musculaire tout à fait remarquables. Pearl soignait son Posing (il reprit des poses d’Eugen Sandow, et il introduisit notamment la musique en compétition), il publiait de nombreux livres sur le culturisme, et il performait également dans les sports de force.
J’en profite d’ailleurs pour glisser ici que les bodybuilders du XX siècles furent dans leur grande majorité des athlètes pourvus d’une grande force et d’une grande puissance, à l’instar des pionniers du culturisme du XIX siècle et du tout début du XX siècle. Si cette double caractéristique deviendra moins courante à partir des années 1980, il n’en resta pas moins que jusqu’à cette période assez récente il n’était pas rare de voir des Mr. America ou Mr. Univers faire des démonstrations de Force lors de grands shows, et même de participer à l’occasion à des compétitions de Powerlifting ou bien de type "homme fort", et d’en remporter parfois le titre.

Pour en revenir à Bill Pearl, ce que l’on retiendra le plus de cette icône du culturisme, c’est avant tout son incroyable carrière de compétiteur : elle aura duré près de vingt ans, et sans baisse de régime en plus ! Cette incroyable longévité lui a ainsi permis de fouler les scènes internationales aux côtés d’autres grands champions du Silver Age mais aussi du Golden Age. Se forgeant un palmarès encore plus prestigieux que celui de Reg Park, Bill Pearl fut ainsi le seul athlète à avoir remporter plusieurs titres mondiaux à la fois sur l’une et l’autre de ces deux grandes périodes de l’histoire de ce sport : Mr. America AAU 1953, Mr. USA 1956, et 3 fois Mr. Univers NABBA en 1961, 1967, et enfin en 1971 où à 41 ans il remporta le titre au nez et à la barbe de trois des plus grandes légendes de l’époque, j’ai nommé Reg Park, Sergio Oliva, et Frank Zane ! C’est tout simplement époustouflant !

Bill Pearl
Bill Pearl
Bill Pearl
Bill Pearl
Mr Univers NABBA 1971 : Bill Pearl, Reg Park, Sergio Oliva
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  Coach
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Bodybuilding Masculin, focus du moment
Chris Bumstead
• 2015 - CBBF Championships, Men’s Junior, 1st
• 2016 - CBBF Championships, Open Heavyweight, 2nd
• 2016 - IFBB North American Championships, 1st (Pro Card)
• Mr Olympia Classic Physique : 2nd in 2017 and 2018 ; Winner in 2019 and 2020

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Bodybuilding Féminin, focus du moment
Hattie Boydle
• 2015 - WBFF World Championships, 4th
• 2016 - WBFF World Championships, 1st

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Mémoire du Bodybuilding, la Rétrospective du moment
Larry Scott
» Ses meilleurs résultats :
• 1959 - Mr. Idaho, Winner
• 1960 - Mr. California - AAU, Winner
• 1961 - Mr. Pacific Coast - AAU, Winner
• 1962 - Mr. America IFBB, Winner
• 1963 - Mr. Universe IFBB, 1st in Medium
• 1964 - Mr. Universe IFBB, Winner
• 1965 - Mr. Olympia, Winner
• 1966 - Mr. Olympia, Winner

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